Lorsque l’administration entreprend un contrôle de comptabilité dans les locaux d’une entreprise, elle doit respecter certaines mesures protectrices du contribuable vérifié.
Ainsi, le vérificateur doit notamment prévenir de sa visite en notifiant au contribuable un avis de vérification avant de procéder à des interventions dans l’entreprise, et le contrôle sur place des livres et documents ne peut s’étendre sur une durée supérieure à 3 mois pour les entreprises développant une activité commerciale, industrielle, agricole ou non commerciale dont le chiffre d’affaires annuel ou les recettes ne dépassent pas, sur une année, certains seuils qui diffèrent selon l’activité exercée :
– 763 000 € pour les activités de vente ;
– 230 000 € pour les prestations de services ;
– 350 000 € pour les activités agricoles.
Ce délai de 3 mois court à compter du jour de la première intervention sur place du vérificateur et se termine lors de sa dernière visite précédant l’envoi de la proposition de rectification.
Cette règle constitue une garantie importante pour les contribuables puisque son inobservation entraîne la nullité absolue et inconditionnelle des impositions découlant de ce contrôle. Cette irrégularité n’est, en effet, pas susceptible d’être réparée par une nouvelle vérification de la même période.
À noter
pour les autres entreprises, l’administration fiscale se doit seulement de réaliser les opérations de vérification dans un délai raisonnable.
Exceptionnellement, lorsque l’administration fiscale craint que le contribuable ne profite du délai courant entre la notification de l’avis de vérification et la première intervention sur place pour faire disparaître des preuves, elle peut procéder à un contrôle inopiné dans l’entreprise. Ce contrôle « surprise » est alors obligatoirement limité à la constatation de l’existence d’éléments matériels (existence et état des documents comptables, inventaire physique des stocks, relevé de prix, etc.). Dans cette hypothèse et contrairement à la procédure de vérification classique, l’avis n’est donc pas notifié préalablement, mais remis en main propre au début du contrôle inopiné. À l’issue de cette intervention sur place, un état est dressé par le vérificateur et le contribuable.
À noter
dans ces circonstances, la poursuite des opérations de vérification de comptabilité ne peut intervenir qu’après un délai raisonnable fixé à 2 jours.
Mettant fin aux hésitations des juges du fond, le Conseil d’État vient d’indiquer clairement que lorsque l’intervention du vérificateur dans une entreprise débute par un contrôle inopiné, cette opération ne constitue pas le commencement de la vérification sur place et n’a pas à être prise en compte pour calculer le délai de 3 mois.
Dans ce cas, la vérification de comptabilité ne débute que lorsque le vérificateur commence à contrôler la sincérité des déclarations fiscales du contribuable par des investigations faites sur place. Les relevés et constatations effectués lors du contrôle inopiné ne valent pas commencement de vérification. Ce simple état des lieux se distingue en effet de l’examen critique des documents qui a lieu lors des opérations de vérification.
Entreprises exclues de la limitation spécifique de la durée des vérifications sur place
> Les entreprises qui dépassent les seuils que nous avons indiqués précédemment, ne sont pas concernées par cette limitation de la durée des vérifications.
> Et par dérogation, les sociétés holding sont exclues de la mesure de protection lorsqu’elles détiennent des participations financières importantes, pour un montant total d’au moins 7 600 000 €, même lorsqu’elles remplissent la condition liée au chiffre d’affaires.
> La garantie ne s’applique pas non plus aux entreprises dont l’objet est civil et dont l’activité se borne à la gestion non commerciale de leur patrimoine immobilier (sociétés civiles immobilières exerçant une activité de location immobilière par exemple).
À noter
lorsqu’une entreprise industrielle ou commerciale développe à la fois des activités de vente et de prestations de services, la limitation à 3 mois de la durée de vérification ne s’applique qu’à la double condition que le chiffre d’affaires global n’excède pas le plafond prévu pour les activités de vente et que le chiffre d’affaires des prestations de services ne dépasse pas le plafond prévu pour ce type d’activité. Enfin, en cas d’exploitation de plusieurs entreprises, le chiffre d’affaires à retenir pour apprécier si la limite s’applique ne sera globalisé que s’il s’agit en réalité d’une seule et même entreprise.
Opérations ne devant pas être prises en compte pour apprécier le délai de 3 mois
La loi n’encadre dans le temps que les interventions sur place de l’agent des impôts lors d’une vérification de comptabilité. Ainsi, comme le Conseil d’État l’a rappelé, pour les investigations réalisées par le vérificateur lors d’un contrôle inopiné, les interventions sur place se rattachant à l’exercice du droit de communication ou ayant pour objet d’opérer des constatations matérielles ne nécessitant aucun examen des écritures ne font pas courir le délai de 3 mois. Cette limitation ne concerne pas non plus la durée des expertises ordonnées par les tribunaux.
Par ailleurs, la garantie n’est pas opposable à l’administration lorsque celle-ci réalise des contrôles au sein d’une entreprise vérifiée à la suite des observations ou de requêtes présentées par le contribuable après l’achèvement des opérations de vérification.
Elle ne peut non plus être invoquée dans le cadre d’examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ou lors de l’examen des comptes financiers mixtes, ni pour la vérification des comptes utilisés pour l’exercice d’activités distinctes.
Enfin, si la date du début des opérations de contrôle initialement fixée par l’avis de rectification est modifiée à la demande du contribuable, le délai de 3 mois ne sera alors décompté qu’à partir de la nouvelle date retenue.
Rappel
évidemment, cette règle ne fait pas obstacle à ce qu’une entreprise fasse l’objet de plusieurs vérifications de comptabilité réalisées par le même vérificateur, si ces contrôles ne concernent pas les mêmes impôts et les mêmes années d’imposition.
Prorogation de la durée des opérations de vérification
La loi de finances rectificative pour 2007 a créé une dérogation à ce délai de 3 mois, en cas de graves irrégularités privant la comptabilité de la PME vérifiée de valeur probante. Pour les avis de vérification notifiés après le 1er janvier 2008 aux entreprises concernées par cette garantie, les opérations de contrôle sur place pourront se dérouler sur plus de 3 mois, sans toutefois pouvoir dépasser 6 mois. En effet, si ce délai de 6 mois n’était pas respecté par le vérificateur, la procédure de contrôle et les rappels d’impôts en découlant seraient nuls.
En pratique
sont considérées par l’administration fiscale comme des irrégularités présentant un caractère de gravité indiscutable, les balances inexactes, les erreurs répétées de reports, l’enregistrement non chronologique des opérations, l’absence de pièces justificatives de recettes ou de dépenses, les fausses factures, le solde de compte caisse fréquemment créditeur, etc. En revanche, les juges ne considèrent pas que le non-respect formel de certaines obligations comptables puisse justifier le rejet global d’une comptabilité.
Par ailleurs, la loi permet désormais à l’administration fiscale de déroger à la limitation à 3 mois de la durée du contrôle dans les petites entreprises dans deux autres situations :
– aucune limitation de la durée du contrôle ne s’applique aux vérifications de comptabilité de l’année ou de l’exercice au cours duquel l’administration a dressé un procès-verbal de flagrance et aux vérifications des années antérieures. La vérification sur place pourra donc dans ce cas excéder 6 mois ;
– pour les vérifications portant sur des comptabilités informatisées, la durée du contrôle est prorogée du délai nécessité par la préparation des traitements informatiques.
Qu’elle débute par un contrôle inopiné ou plus couramment après l’avis de notification, nous devons inciter les clients du Cabinet concernés par une vérification de leur comptabilité à nous informer rapidement de la venue de l’agent des impôts dans leur entreprise pour que nous puissions les assister dès le début de la procédure dans les meilleures conditions.
En effet, l’annonce d’une vérification de comptabilité peut être une expérience traumatisante pour certains clients. Nous devons les aider à dédramatiser cet événement, en préparant avec eux, dès la réception de l’avis de vérification, la venue du vérificateur, afin que le contrôle ait le moins d’incidences possible sur le fonctionnement quotidien de leur entreprise.
Il peut être opportun de leur proposer un audit succinct de l’ensemble de leurs obligations juridiques, comptables et fiscales, de vérifier avec eux notamment qu’ils sont bien à jour de leurs obligations déclaratives, et de faire le point avec eux sur l’ensemble des documents à communiquer au vérificateur (documents comptables, registre des assemblées générales et du conseil d’administration, rapports généraux et spéciaux du commissaire aux comptes, pièces justificatives de recettes, etc.).
Vous devez également leur conseiller d’informer au plus vite l’ensemble de leurs salariés, notamment les cadres administratifs et comptables, afin que le climat du contrôle soit le plus paisible possible.
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