Des événements en cours à la clôture de l’exercice doivent rendre la perte probable.
Outre le fait que la créance doit obligatoirement être inscrite à l’actif du bilan et résulter d’une gestion commerciale normale de l’entreprise, la déduction d’une provision pour créance douteuse suppose notamment que des événements en cours à la clôture de l’exercice rendent la perte probable. Seule la situation au jour de la clôture de l’exercice doit être prise en compte pour apprécier la probabilité de la perte. Une provision ne peut donc pas trouver son origine dans un événement prenant naissance après la clôture de l’exercice.
À noter :
le caractère probable d’une perte constitue essentiellement une question de fait qui doit s’apprécier au regard des circonstances propres à chaque entreprise. Par exemple, une provision peut se fonder sur la faillite d’un client, mais non sur la perspective d’une crise économique laissant penser que des clients pourraient éprouver des difficultés à s’acquitter de leurs dettes. De la même façon, le défaut de paiement d’une créance à son échéance ne justifie pas, à lui seul, la constitution d’une provision.
Une entreprise peut recourir à la méthode statistique pour calculer le montant de la provision.
Le risque de non-recouvrement doit être « nettement précisé » quant à sa nature et à son montant.
Nature de la perte
L’entreprise doit préciser les créances qui font l’objet d’une provision et justifier les motifs qui les rendent douteuses. La justification doit être apportée créance par créance. Cela signifie que l’entreprise ne peut pas demander la déduction des provisions destinées à couvrir le risque général de non-recouvrement de l’ensemble de ses créances.
Montant de la perte
Le montant de la provision ne doit pas dépasser le montant de la créance ou de la fraction dont le recouvrement est compromis. En revanche, l’entreprise peut déduire une provision pour un montant moins élevé. La TVA étant intégralement récupérable en cas d’impayé, la provision doit être limitée au montant hors taxes de la créance.
Le montant de la provision doit, par ailleurs, être évalué avec une précision suffisante. C’est pourquoi il ne peut pas être déterminé par un mode de calcul global et forfaitaire, tel que l’application de pourcentages arbitraires au montant total des créances à recouvrer ou au montant du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise. Toutefois, la jurisprudence admet le recours à une méthode d’évaluation statistique, par catégorie de créances, dès lors que cette méthode se justifie au regard de l’activité de l’entreprise (nombre important de clients, faible valeur unitaire des produits…). En effet, cette méthode doit être tirée de l’expérience de l’entreprise et établie d’après un ensemble d’opérations homogènes, permettant de déterminer avec précision le montant probable de la perte.
À cet égard, le Conseil d’État a rappelé, dans sa décision du 17 février 2016 (n° 377415), que l’existence de créances douteuses ne peut pas se justifier sur la base d’éléments statistiques ne se rattachant pas à un événement en cours à la clôture de l’exercice (incidents de paiement, relances infructueuses…).
Les faits :
une société de formation professionnelle continue à distance, ayant plus de 16 000 clients, avait classé ses créances en plusieurs catégories en fonction du nombre de relances effectuées (allant de 0 à 5). Elle avait notamment déduit des provisions pour créances douteuses au sujet de clients à jour de leurs paiements et n’ayant fait l’objet d’aucune relance, en se basant sur des incidents de paiement survenus au cours d’exercices antérieurs. Ces provisions ont été considérées non conformes par les juges car aucun incident de paiement n’était en cours à la clôture de l’exercice en cause.
Pour être fiscalement déductibles, les provisions doivent effectivement être comptabilisées.
Pour être fiscalement déductibles, les provisions doivent effectivement être comptabilisées. Les provisions constituées dans les comptes d’un exercice devant être déduites au titre de ce même exercice.
Elles doivent, par ailleurs, figurer sur le tableau des provisions n° 2056 (régime réel normal) ou n° 2033-D (régime simplifié), à joindre à la déclaration de résultats de l’exercice. À défaut de produire le tableau ou en cas de renseignements incomplets ou inexacts, l’entreprise encourt une amende. Cette amende étant due au titre de l’exercice où l’infraction a été relevée.
En pratique :
l’entreprise doit indiquer dans le tableau l’objet précis des provisions, qui ne peut plus être modifié après l’expiration du délai de déclaration.
Une créance douteuse ne doit pas être confondue avec une créance irrécouvrable.
Les entreprises confrontées aux difficultés financières de leurs débiteurs doivent parfois déterminer s’il s’agit de créances douteuses, à comptabiliser en provision, ou de créances irrécouvrables, pour lesquelles elles doivent constater une charge définitive.
Lorsqu’une créance est devenue irrécouvrable, elle constitue, en principe, une charge déductible des résultats de l’entreprise au titre de l’exercice au cours duquel la perte est certaine.
Mais cette notion de perte définitive n’est pas toujours aisée à appréhender. Si l’ancienneté d’une créance ou l’encaissement d’un chèque sans provision constituent des indices, ils ne suffisent pas, à eux seuls, à établir le caractère définitif de la perte de la créance. En revanche, l’administration fiscale considère que lorsque le débiteur a disparu sans laisser d’adresse ou que le chèque est volé, la créance est irrécouvrable.
L’ouverture d’une procédure collective à l’encontre d’un débiteur justifie la constitution d’une provision pour créance douteuse.
Le simple fait qu’une procédure collective soit ouverte à l’encontre d’un débiteur ne suffit pas à rendre la créance détenue sur lui définitivement irrécouvrable. Mais le risque de non-recouvrement de la créance lié à la situation de ce débiteur justifie que l’entreprise constate une provision pour créance douteuse. En revanche, les juges estiment qu’une entreprise peut constater la perte partielle d’une créance si le débiteur a été placé en liquidation judiciaire et qu’un plan d’apurement de ses créances prévoit le règlement d’une partie seulement de la créance en cause.
En pratique :
une entreprise peut valablement constater une perte à hauteur de 30 % d’une créance qu’elle détient sur une société en liquidation judiciaire dès lors que le plan d’apurement des dettes de cette dernière prévoit le règlement de seulement 70 % de la créance. En effet, elle peut, dans ce cas, estimer que le remboursement du solde est compromis et comptabiliser une perte définitive pour les 30 % restants.
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