Loi n° 2009-974 du 10 août 2009, JO du 11 et Décret n° 2009-1134 du 21 septembre 2009, JO du 22
La loi interdit d’occuper un même salarié plus de 6 jours par semaine. Celui-ci doit en effet bénéficier d’un repos hebdomadaire au moins égal à 24 heures consécutives. Et ce repos lui est en principe accordé le dimanche.
Toutefois, de nombreuses dérogations à ce repos dominical obligatoire existent, qu’elles soient de droit ou qu’elles nécessitent une autorisation particulière. À ce titre, la loi du 10 août 2009 a élargi les possibilités de dérogation existantes, notamment dans les communes touristiques ou thermales et dans les très grandes agglomérations.
S’agissant des communes touristiques ou thermales, la loi a modifié le régime applicable, jugé trop complexe à mettre en oeuvre et trop restrictif. Seuls certains commerces de vente au détail pouvaient en effet ouvrir, les magasins de luxe n’en faisant, par exemple, en principe pas partie (exemple : Louis Vuitton sur les Champs-Élysées). Désormais, tous les commerces situés dans des communes touristiques ou thermales ont le droit d’ouvrir de façon à permettre aux commerces les plus divers de profiter pleinement de la présence des nombreux visiteurs étrangers.
Quant aux très grandes agglomérations, celles de plus d’un million d’habitants, la loi a créé pour elle une nouvelle dérogation au repos dominical, à condition qu’il existe dans l’agglomération un périmètre d’usage de consommation exceptionnel (Puce).
Remarque
la création des Puce a pour but de légaliser une situation qui, en pratique, existait déjà. Certaines zones commerciales avaient en effet pris l’habitude depuis plusieurs années d’ouvrir le dimanche sans autorisation, tels, par exemple, « Plan-de-campagne » dans les Bouches-du-Rhône ou « Éragny » dans le Val-d’Oise.
Dans ces très grandes agglomérations, les consommateurs manquent en effet souvent de temps en semaine pour faire leurs achats, et les magasins sont saturés le samedi ; l’ouverture dominicale facilite donc leur vie quotidienne. Prenant en compte cette particularité des très grandes agglomérations, la loi autorise désormais, dans les zones où un usage de consommation dominicale existe, les commerces de détail à ouvrir le dimanche sur autorisation préfectorale.
Attention
les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin font l’objet d’une réglementation spécifique qui n’est pas remise en cause par la loi du 10 août 2009.
La loi du 10 août 2009 et, le cas échéant, son décret d’application publié au Journal officiel le 22 septembre dernier ont donc, d’une façon plus générale, à la fois :
– élargi la dérogation accordée aux commerces de détail alimentaire ;
– modifié le régime dérogatoire des communes touristiques ou thermales ;
– mis en place de nouvelles contreparties pour les salariés travaillant le dimanche dans les commerces de détail ;
– créé une nouvelle dérogation spécifique pour les commerces de détail non alimentaires installés dans les Puce ;
– prévu de nouvelles contreparties pour les salariés travaillant le dimanche dans les établissements dont la fermeture serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement.
Les dérogations accordées aux commerces de détail alimentaire
Qui est concerné ?
Les commerces de détail alimentaire pouvaient jusqu’à présent faire travailler leurs salariés le dimanche jusqu’à midi au plus tard. Depuis la loi du 10 août 2009, l’heure limite est repoussée à 13 heures, les parlementaires ayant estimé cet horaire plus compatible avec les usages actuels de consommation.
Quelles sont les contreparties pour les salariés ?
Sauf dispositions conventionnelles plus favorables, la rémunération des salariés travaillant le dimanche n’est pas majorée. Quant au repos compensateur, ils doivent en principe bénéficier d’une journée entière par roulement et par quinzaine.
Les dérogations accordées aux commerces de détail implantés dans les communces touristisques ou thermales
Qui est concerné ?
Cette dérogation concerne les commerces situés dans :
– les communes d’intérêt touristique ;
– les communes thermales ;
– les zones touristiques d’affluence exceptionnelle ;
– ou les zones d’animation culturelle permanente.
En pratique
la liste des communes et des zones concernées est établie par le préfet sur proposition du maire. Pour figurer sur cette liste, les communes ou zones (un quartier particulier, par exemple) doivent accueillir pendant certaines périodes de l’année une population supplémentaire importante en raison de leurs caractéristiques naturelles, artistiques, culturelles ou historiques ou de l’existence d’installations de loisirs ou thermales à forte fréquentation.
Cette dérogation était toutefois jusqu’à présent limitée puisqu’elle ne valait que pour les commerces de détail commercialisant certains biens ou services (ceux d’ordre sportif, culturel ou récréatif) et obtenant une autorisation préfectorale, et ne jouait que pendant les périodes d’activité touristique. La loi du 10 août 2009 lève ces restrictions. Tous les commerces de vente au détail situés dans ces communes ou zones peuvent désormais ouvrir le dimanche, sans avoir à demander une autorisation du préfet. En outre, l’ouverture des commerces le dimanche n’est plus limitée aux seules périodes d’activité touristique.
Précision
les commerces de détail alimentaire ne sont pas concernés par cette dérogation puisqu’ils bénéficient déjà d’une dérogation à l’interdiction du travail le dimanche jusqu’à 13 heures.
Quelles sont les contreparties pour les salariés ?
La loi ne prévoit aucune majoration de salaire ni repos compensateur spécifiques pour les salariés travaillant le dimanche, le repos hebdomadaire leur étant accordé par roulement. Certaines conventions collectives prévoient toutefois des majorations de salaire pour les salariés travaillant le dimanche. Et la loi vient de créer une obligation de négocier : l’employeur ou les organisations professionnelles et les organisations syndicales représentatives sont ainsi tenus d’engager des négociations en vue de conclure un accord relatif aux contreparties accordées aux salariés privés de repos dominical lorsque la branche ou l’entreprise n’est pas déjà couverte par un accord.
Remarque
la loi n’oblige l’employeur qu’à engager des négociations en vue de conclure un accord et non à conclure un accord.
Les dérogations accordées à l’ensemble des commerces de détail
Qui est concerné ?
Le maire (ou le préfet de ville pour Paris) peut en principe autoriser, le dimanche, l’emploi de salariés du commerce de détail (qu’il soit alimentaire ou non alimentaire), alors que le repos hebdomadaire tombe normalement ce jour-là, pour un maximum de cinq dimanches par an.
Dans ce cas, l’employeur ne doit faire travailler que des salariés volontaires.
Quelles sont les contreparties pour les salariés ?
L’employeur devait jusqu’à présent accorder aux salariés concernés un repos compensateur (dont la durée n’était pas déterminée) ainsi qu’une majoration de salaire égale à 1/30 de leur traitement mensuel (ou à la valeur d’une journée de travail s’ils sont payés à la journée).
La loi du 10 août 2009 renforce les contreparties accordées aux salariés. Ceux-ci doivent ainsi percevoir une rémunération au moins égale au double de la rémunération normalement due pour une durée équivalente. Et désormais, ils doivent aussi bénéficier d’un repos compensateur qui doit être équivalent en temps. L’arrêté municipal (ou préfectoral à Paris) prévoit que ce repos est accordé soit collectivement, soit par roulement dans la quinzaine qui précède ou suit le dimanche travaillé.
Remarque
la loi a également créé, dans le cadre de cette dérogation, une obligation de négocier en vue de conclure un accord relatif aux contreparties accordées aux salariés privés de repos dominical lorsque la branche ou l’entreprise n’est pas déjà couverte par un accord.
Les dérogations spécifiques aux commerces de détail situés dans les Puce
Qui est concerné ?
La loi du 10 août 2009 introduit une nouvelle dérogation au repos dominical pour les établissements de vente au détail mettant à disposition des biens et des services (les établissements dont l’activité principale est la vente de denrées alimentaires au détail étant toutefois exclus) situés dans les unités urbaines de plus de 1 000 000 d’habitants. Il en existe aujourd’hui quatre en France : Paris, Aix-Marseille, Lyon, Lille.
Au sein des unités urbaines, ne sont toutefois concernés par cette dérogation que les périmètres d’usage de consommation exceptionnel (Puce) qui se caractérisent par des habitudes de consommation dominicale, l’importance de la clientèle concernée et l’éloignement de celle-ci du périmètre.
Remarque
selon les débats parlementaires, Lyon, qui ne connaît pas d’usage de consommation dominicale, serait ainsi exclu.
En pratique, c’est le préfet de région qui fixe la liste des unités urbaines concernées et délimite les Puce. Il accorde ensuite des autorisations pour 5 ans aux commerces souhaitant déroger au repos dominical.
Les dérogations au repos dominical ne peuvent toutefois être accordées qu’au vu d’un accord collectif ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur prise après avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel. Cette décision patronale doit ensuite être approuvée par référendum par les salariés concernés par cette dérogation (c’est-à-dire a priori l’ensemble des salariés susceptibles de travailler le dimanche).
Par ailleurs, chaque salarié doit donner son accord par écrit pour travailler le dimanche. Son refus ne constitue en effet ni une faute, ni un motif de licenciement, et ne doit pas faire l’objet d’une mesure discriminatoire. Et même s’il accepte, le salarié peut, au vu de l’évolution de sa situation personnelle, demander à ne plus travailler le dimanche.
De plus, lorsque le travail le dimanche a été mis en place par décision unilatérale de l’employeur, le salarié bénéficie de garanties supplémentaires. Il peut ainsi refuser de travailler trois dimanches de son choix par année civile, à condition de respecter un délai de prévenance d’un mois. L’employeur doit également l’informer annuellement de son droit de cesser de travailler le dimanche s’il le souhaite. Le salarié doit notifier sa décision par écrit, cette décision prenant alors effet 3 mois après sa notification écrite.
Parallèlement, l’employeur doit demander chaque année aux salariés travaillant le dimanche s’ils souhaitent bénéficier d’une priorité pour occuper ou reprendre un emploi correspondant à leur catégorie professionnelle ou équivalent dans le même établissement ou la même entreprise n’obligeant pas à travailler les dimanches.
Commentaire
le droit pour un salarié de revenir annuellement sur sa décision de travailler le dimanche résulte d’un amendement voté par les députés, qui ont considéré que dans les petites structures, le mécanisme de la priorité sur un autre emploi n’obligeant pas à travailler le dimanche risquait de revêtir un caractère purement théorique. Du coup, on peut se demander si ce mécanisme de priorité présente encore une véritable utilité.
Quelles sont les contreparties pour les salariés ?
L’accord collectif ou la décision unilatérale doivent fixer des contreparties au profit des salariés privés du repos dominical, des engagements pris en terme d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées, ainsi que les conditions dans lesquelles l’employeur prend en compte l’évolution de la situation personnelle des salariés privés de repos dominical.
Dans le cas d’une décision unilatérale, le salarié doit nécessairement bénéficier d’un repos compensateur (dont la durée minimale n’est toutefois pas fixée par la loi) et d’une rémunération au moins doublée. L’accord collectif, lui, peut prévoir d’autres contreparties qui peuvent normalement être moins favorables, le cas échéant.
Remarque
la loi a également créé pour cette dérogation une obligation de négocier en vue de conclure un accord relatif aux contreparties accordées aux salariés privés de repos dominical lorsque la branche ou l’entreprise n’est pas déjà couverte par un accord. À noter qu’un accord collectif régulièrement négocié postérieurement à une décision unilatérale s’appliquera dès sa signature en remplacement des contreparties prévues par la décision unilatérale.
Les dérogations dans les établissements dont la fermeture serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement
Qui est concerné ?
Le préfet peut autoriser, pour une durée limitée, le travail le dimanche (pendant tout ou partie de la journée) dans les établissements dont la fermeture complète ce jour-là serait préjudiciable au public ou compromettrait le fonctionnement normal de l’établissement (par exemple, les commerces situés à proximité de marchés dominicaux).
C’est à l’établissement de faire la demande d’autorisation.
À l’instar des Puce, la dérogation au repos dominical ne pourra désormais être accordée qu’au vu d’un accord collectif ou, à défaut, d’une décision unilatérale de l’employeur approuvée par référendum et fixant des contreparties et des engagements en terme d’emploi. Le salarié devant également donner son accord par écrit et pouvant revenir périodiquement sur son choix.
Quelles sont les contreparties pour les salariés ?
Comme pour les Puce, les contreparties sont fixées par accord collectif ou décision unilatérale. Dans le cas d’une décision unilatérale, le salarié doit nécessairement bénéficier d’un repos compensateur et d’une rémunération au moins doublée.
Remarque
l’obligation de négocier en vue de conclure un accord relatif aux contreparties accordées aux salariés privés de repos dominical s’applique également à cette situation.
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