Reprenant à son compte un certain nombre de propositions contenues dans un rapport remis en 2009 au président de la République (le rapport Darrois), qui soulignait les inconvénients liés à l’exercice des professions libérales en société, la loi du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées (Loi n° 2011-331 du 28 mars 2011, JO du 29) est venue améliorer les conditions d’exercice de ces professions en société.
Le point sur les principales nouvelles mesures introduites qui, pour la plupart d’entre elles, sont entrées en vigueur dès le lendemain de la publication de la loi du 28 mars 2011.
Dénomination des sociétés civiles professionnelles (SCP)
Avant la réforme
Les sociétés civiles professionnelles ne pouvaient être désignées que par une raison sociale nécessairement constituée des noms, qualifications et titres professionnels de tous les associés ou des noms, qualifications et titres professionnels d’une partie d’entre eux suivis des mots « et autres ».
À la différence des sociétés d’exercice libéral (Sel), les SCP ne pouvaient, dès lors, avoir de dénomination de fantaisie.
En outre, si le nom d’un ou de plusieurs anciens associés (les fondateurs en particulier) pouvait être conservé dans la raison sociale, c’était à la double condition :
– que la mention de leur nom soit précédée du mot « anciennement » ;
– qu’au nombre des associés, une personne au moins ait exercé au sein de la société avec l’ancien associé dont le nom est maintenu.
Après la réforme
Désormais, les SCP peuvent être désignées par une dénomination pouvant comprendre le nom d’un ou de plusieurs associés.
Mais il ne s’agit plus là que d’une simple faculté et non d’une obligation. Il est donc désormais possible de donner à une SCP une dénomination de pure fantaisie.
Seule contrainte : la dénomination doit être suivie ou précédée de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », elles-mêmes suivies de l’indication de la profession exercée.
Par ailleurs, la réforme a supprimé les limitations pesant sur le droit à faire état du nom d’anciens associés.
Responsabilité financière des associés de SCP
Avant la réforme
À la différence des associés de société civile de droit commun, les associés de société civile professionnelle étaient tenus solidairement et indéfiniment des dettes de la société à l’égard des créanciers de cette dernière.
À noter
les statuts de la SCP pouvaient néanmoins prévoir que, dans leurs rapports entre eux, les associés ne seraient tenus des dettes que dans la limite de leur part dans le capital social.
Après la réforme
La loi du 28 mars 2011 a supprimé le terme « solidairement » et aligné le régime de responsabilité aux dettes sociales des associés de SCP sur celui des associés de société civile de droit commun.
Ainsi, désormais, les associés de SCP ne sont plus tenus des dettes sociales que de manière indéfinie et conjointe.
Conséquence : les créanciers de la société ne peuvent agir en paiement à leur encontre qu’après avoir vainement mis en demeure la société.
Remarque importante
la loi du 28 mars 2011 a également supprimé le régime d’obligation solidaire aux dettes sociales pour les associés de société en participation de professions libérales.
Valorisation des parts sociales de SCP
Désormais, les associés de SCP peuvent librement définir, par une clause des statuts, les principes et les modalités applicables à la détermination de la valeur des parts sociales.
Cette clause ne peut cependant être adoptée qu’à l’unanimité des associés.
À noter
la présence d’une telle clause dans les statuts présente un intérêt particulier dans le cas d’un désaccord sur le prix de cession de titres de SCP. Dans cette hypothèse, l’expert désigné en justice ne pourra plus librement apprécier les critères lui permettant de déterminer la valeur des titres. Il devra respecter le cadre imposé par la clause.
En outre, la loi du 28 mars 2011 consacre la pratique selon laquelle la valeur des parts sociales prend en considération une valeur représentative de la clientèle, mais en y apportant deux limites :
– ce principe peut être écarté par une disposition d’un décret particulier à chaque profession ;
– une clause des statuts adoptée à l’unanimité des associés peut exclure cette valeur représentative de la clientèle civile de la valorisation des parts sociales.
Ainsi, les associés d’une SCP auront désormais la faculté de prévoir dans les statuts que les apports de clientèle ne seront pas valorisés et d’évaluer ainsi les parts sociales à leur valeur comptable, et non à leur valeur vénale tenant compte de celle de la clientèle. Car prendre en compte la valeur de la clientèle d’un associé qui quitte la société alors que cette clientèle a souvent une forte tendance à le suivre et à ne pas rester attachée au Cabinet est de nature à fragiliser une SCP.
Dénomination des sociétés d’exercice libéral
Comme il est désormais prévu pour les SCP, la dénomination des Sel (sociétés d’exercice libéral) :
– doit être précédée ou suivie de l’indication de la profession exercée ;
À noter
cette mesure s’applique également aux sociétés en participation de professions libérales. Dans leur cas, la dénomination doit, en outre, être précédée ou suivie de la mention « société en participation » ou des initiales « SEP ».
– peut inclure le nom d’un ou plusieurs associés ;
– et la mention du nom d’anciens associés dans la dénomination de la Sel devient possible sans limitation.
Régime des sociétés de participations financières de professions libérales
La loi du 28 mars 2011 a également pour ambition de favoriser le développement de l’interprofessionnalité au sein des professions du droit. À cette fin, elle a assoupli le régime des sociétés de participations financières de professions libérales (SPFPL).
Avant la réforme
Les SPFPL ont été instituées il y dix ans par la loi dite Murcef du 11 décembre 2001.
Il s’agit de sociétés holdings ayant pour objet de prendre des participations dans des sociétés d’exercice libéral ou dans des groupements étrangers de professions libérales.
Mais en 10 ans, la pratique des SPFPL est demeurée faible, surtout en raison des contraintes pesant sur leur régime. Notamment, les SPFPL ne pouvaient détenir une participation minoritaire dans une Sel que si leurs associés exerçaient la profession au sein de la Sel.
Après la réforme
Désormais, le droit pour une SPFPL de prendre une participation minoritaire dans une Sel n’est plus subordonné à la condition d’exercice par les associés de la SPFPL de leur profession au sein de la Sel.
En outre, à compter de la publication d’un décret d’application à venir, les SPFPL pourront détenir des parts ou des actions de sociétés ayant pour objet l’exercice, non plus d’une seule et même profession, mais de plusieurs professions réglementées du chiffre et du droit : notaire, avocat, huissier de justice, commissaire-priseur, expert-comptable, commissaire aux comptes, conseil en propriété intellectuelle.
Cette faculté sera toutefois subordonnée aux principales conditions suivantes :
– la majorité du capital et des droits de vote devra être détenue par des personnes exerçant leur profession au sein des sociétés dans lesquelles la SPFPL prendra une participation ;
– les dirigeants de la SPFPL devront être choisis parmi les membres des professions exerçant au sein de ces sociétés.
Par ailleurs, la loi précise que ces SPFPL ne pourront détenir une participation majoritaire dans une Sel que si la majorité de leur capital et de leurs droits de vote est détenue par des professionnels exerçant la même profession que celle constituant l’objet de la Sel.
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